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Accident corporel et définition des postes de préjudice : un projet de décret vers une nomenclature officielle ?

En décembre 2014, les spécialistes de la réparation du préjudice corporel prennent connaissance d’un projet de décret visant à instaurer une nouvelle nomenclature des postes de préjudices résultant d’un dommage corporel. Elle s’inspire de la nomenclature de référence élaborée en 2005, dite nomenclature Dintilhac, après que deux commissions successives (Yvonne Lambert-Faivre en 2003 et Dintilhac en 2005) se soient penchées sur une redéfinition plus précise des préjudices des victimes, toujours dans l’idée de défendre une indemnisation pleine et entière. Destiné à supprimer certaines inégalités de traitement entre les victimes et à mieux détailler les préjudices, ce nouveau projet de décret pose questions, malgré tout, aux défenseurs et spécialistes de la réparation du Préjudice Corporel. D’une part, car il faudrait vraiment y mettre tous les préjudices non-reconnus plus ceux qui sont noyés « tout en un »… D’autre part, car cette nouvelle nomenclature n’est peut-être qu’un pas vers la mise en place du fameux barème médical unique qui ressort de temps en temps des cartons… Lequel barème médical unique mettrait fin à l’étude de chaque dossier d’accident au cas par cas, uniformisant et déshumanisant tout à la fois...

Au pire du scénario catastrophe, la réparation du Préjudice Corporel deviendrait alors, le règne des calculateurs d’indemnités et des logiciels de classement de victimes…

La SDR Accidents a toujours été résolument du côté de l’Humain et, défend le principe depuis 1986, de l’appréciation de chaque préjudice subi en fonction de l’individu blessé. Chaque victime est une personne. Chaque accident un cas particulier. 

Dés sa sortie en 2005, nous nous sommes donc prévalus de la Nomenclature Dintilhac, devenue, depuis, la bonne base de négociation amiable face aux assureurs, alliée aux décisions de jurisprudence favorables aux victimes.

En fouillant, aussi bien nos propres archives de négociation, que les arrêts de la 2e chambre civile de la Cour de Cassation, on voit bien que, là où les défenseurs des victimes prônent une indemnisation des besoins, les assureurs, eux, veulent indemniser sur preuves et factures produites. D’ailleurs, à l’annonce du projet de décret et de son contenu, L’Argus titrait le 21 janvier « que la réforme Taubira coûterait 1MD€ » aux assureurs… Aux dernières nouvelles, ils sont contre…

Ce qui fait peur aux assureurs en terme de coût dans le projet de décret vers une nomenclature officielle, c’est la multiplication des postes de préjudice qui permettrait de tout détailler, alors qu’actuellement, l’inclusion de certains préjudices les uns dans les autres leur permet de faire des économies…Exemple avec l’assistance temporaire à tierce personne (ATTP), prévu dans la nomenclature Dintilhac au titre des «frais divers» et, que la réforme place en poste de préjudice autonome; «L’incidence professionnelle» aussi qui serait subdivisée en «incidence professionnelle économique» et «incidence professionnelle extra-patrimoniale».

A l’inverse, donc, cette idée de nouvelle nomenclature des préjudices, encore plus détaillée à la faveur des victimes, peut nous faire rêver… Mais, attention !Là où on nous parle de nomenclature, n’est ce pas la porte ouverte à resservir le barème médical unique. 

 Multiples barèmes médicaux mais peur d’un barème unique…Le médecin expert qui doit lister les séquelles de la victime et leur attribuer un coefficient, ne dispose pas d’instruments communs d’analyse pour apprécier le degré d’atteinte à l’intégrité physique et psychique. Même si deux barèmes médicaux sont considérés comme officiels – celui de la Société de Médecine Légale et de Criminologie de France et, celui du Concours médical 2001 dit barème Rousseau -, l’éventail des barèmes utilisés reste assez large.

Mais le 10 février 2010, la commission des Finances a examiné la proposition de loi n° 2055 proposant la création d’un barème médical unique. Une idée  largement plébiscitée par les assureurs, mais qui laissait craindre à ses opposants une indemnisation déshumanisée, désormais « informatique ». Car si l’absence d’un barème unique est source d’inégalités,  la création d’un guide officiel pourrait l’être tout autant, en éloignant l’indemnisation du préjudice corporel de l’appréciation au cas par cas et du principe de réparation intégrale… (Mars 2015)

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